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Le Moulin de la ville

La Guerre de 1870 à Courville

30/12/2021

Il y a 150 ans, notre ville se trouvait impliquée dans la terrible guerre franco-prussienne de 1870-1871

Il est difficile aujourd’hui de s’imaginer que notre ville fut soumise à l’invasion des armées prussiennes et bavaroises. Qu’elle verra les soldats des deux camps se battre dans ses rues et ses habitants subir, réquisitions, pillages et vexations. 150 ans plus tard plongeons nous dans cette période sombre de notre histoire.

Une guerre oubliée

Suite à un contentieux politique et une grave crise diplomatique l’empereur Napoléon III déclare la guerre à la Prusse le 19 juillet 1870. Mal préparée et mal commandée l’armée française s’effondre. L’empereur encerclé dans la ville de Sedan se rend le 1er septembre. Le 4 la république est proclamée, le 19 Paris est encerclé. Replié à Tours le gouvernement décide de continuer la lutte. Malgré un réel héroïsme de ces troupes constituées à la hâte face à un ennemi plus fort, un armistice est proclamé le 28 janvier. Il sera le préalable au traité de Francfort signé le 10 mai 1871 qui met fin à ce conflit amputant le territoire national de l’Alsace et d’une partie de la Lorraine. Une indemnité de guerre de 5 milliards de Francs or est imposé au vaincu. Les prémisses de la « revanche » sont posées. 43 ans plus tard une guerre encore plus terrible éclatera. Ce sera la 1ere guerre mondiale

L’Eure et Loir un département au cœur des combats.

Notre département se trouve rapidement soumis à l’invasion et aux combats. La ville de Châteaudun est attaquée et incendiée le 18 octobre après une héroïque résistance. Le 21 c’est au tour de Chartres d’être occupé sans combats. Dès lors pendant plusieurs semaines le front va se stabiliser. Les troupes françaises tiennent une ligne de Chapelle-Royale à Verneuil sur Avre. Le 17 novembre l’armée Prussienne reprend l’offensive. Une suite de combats a lieu dans le Perche. Point d’orgue de cette campagne la bataille de Loigny voit la défaite de la 2eme armée de la Loire. En ce soir du 2 décembre, 9000 Français et Prussien tués et blessés gisent sur le sol gelé du champ de bataille. Le second combat de la Fourche, le 6 janvier 1871 conclu les actions miliaires en Eure et Loir.

 

Courville sur la ligne de front.

Le 21 octobre jour de la chute de Chartres le Conseil Municipal se réunit en urgence. Il prend la décision que si des cavaliers se présentent, le maire accompagné du conseil Municipal refusera de les accueillir et de parlementer. Il n’acceptera de le faire qu’en présence de forces régulières contre lesquelles la résistance serait impossible. Il ordonne à la garde Nationale de ne tenter aucune action armée sans ordre de celui-ci. Le tragique épisode de Châteaudun calme les ardeurs belliqueuses.

Finalement c’est le 23 octobre que 2 uhlans se présentent pour effectuer des réquisitions de pain, vin, café, eau de vie et avoine. Des voitures avec chevaux et leur conducteur sont réquisitionnées pour transporter ces denrées à Chartres. A la suite de ces cavaliers ce sont 2500 hommes qui occupent la ville. Les fusils de la Garde Nationale sont transportés à Nogent le Rotrou. Un emprunt de 5000 Francs est voté, afin de donner des acomptes aux fournisseurs, pour qu’ils puissent continuer à s’approvisionner en subsistance nécessaire à la population en attendant d’être remboursé. Le 28, 1600 fantassins font leur entrée en ville. Des coups de feu sont entendus dans la direction de Landelles. Le 31 des cuirassiers blancs arpentent les rues. Des gardes mobiles les attendent en centre-ville. Ils ouvrent le feu du bureau de tabac à l’angle de la rue Pannard et de la place (agence immobilière Guy Hoquet). Un cuirassier et son cheval sont tués. Le 1er novembre le Maire, Pierre Nasse est arrêté et emmené devant le général Prussien commandant les troupes auxquelles appartient la victime. Arrivant à faire comprendre à cet officier qu’il ne peut empêcher l’armée française de pénétrer dans sa commune, la ville échappe aux représailles.

La journée du pillage

Le 3 novembre, deux compagnies de gardes mobiles renseignées de la venue d’éclaireurs Prussiens s’embusquent dans les rues. Trois hussards rouges s’engagent dans le faubourg Saint Pierre (rue Aristide Briand) en direction de Chartres. Un groupe de mobiles embusqués rue de l’Eure ouvre le feu. Sous le coup de la surprise un cheval faisant une embardée fait choir son cavalier qui se brise la colonne vertébrale. Il expire quelques instants après. Les mobiles regagnent leurs lignes. Hussards, uhlans, cuirassiers et soldats de l’infanterie soit environ 14000 hommes envahissent la ville. Un accrochage avec des francs-tireurs à Bétaincourt tue deux prussiens et en blesse trois. En représailles trois maisons du hameau sont incendiées. La tension monte dans les rangs des soldats ennemis. Sous l’emprise de la colère de l’alcool, Le pillage de la ville commence. Il va durer toute la nuit n’épargnant personne ni même les bestiaux de la ferme de Masselin. Ils quittent Courville le lendemain mais sont remplacés par d’autres troupes.

Le passage de troupes continu

Le 12 novembre, cette fois ci c’est environ 6000 soldats Français s’installent. 5 jours plus tard ces sont des hussards bleus et rouges qui arrivent. Une batterie d’artillerie prend position entre la gare et le Vaux Joli. Elle ouvre le feu, le combat de Landelles est commencé.

Retour de l’ennemie. Le 20 novembre, 15000 hommes de l’armée Bavaroise du Général Von Der Thann s’installent. Quelques pillages se produisent encore. A partir de ce jour l’occupation devient constante. Le 27 décembre un uhlan hanovrien meurt à l’hôpital, il est inhumé au cimetière. La fête de Noël et le 1er de l’an sont l’occasion d’excès en tout genre. Chaque jour passe des convois de prisonniers Français. Les Courvillois leur donnent des vivres et du tabac. Le 8 janvier passage de prisonniers et de blessés revenant du combat de la Fourche. Le 14, 1200 mobiles fait prisonniers à Connerré couchent à l’église. Une quarantaine d’entre eux s’échappent. Les passages de prisonniers deviennent quotidiens. Le 23 janvier l’un d’entre eux est tué accidentellement dans l’église St Pierre par une sentinelle Prussienne qui manipule son fusil.

Réquisition rime avec occupation

L’ennemi exige à plusieurs reprises une contribution financière, 4650 Francs au mois de novembre et 1824 en décembre. De plus la commune doit subvenir à la nourriture des soldats en garnison ou de passage.

Retour à la vie normale

Les Prussiens quittent définitivement Courville le 15 mars du 1871. Il est estimé à 50000 le nombre de soldats qu’il a fallu héberger et nourrir.

L’heure du bilan et des comptes est arrivée. Les pertes financières sont chiffrées à 180000 Francs. Des indemnités sont versées aux victimes qualifiées de nécessiteuses. Le remboursement des fournisseurs va s’étaler jusqu’en 1872. Notre ville a retrouvé son calme, seul les anciens combattants de 1870 vont maintenir la mémoire de ceux qui ne sont pas revenus de cette guerre en attendant la prochaine.

Les tombes militaires

Soldats de deux camps, tués au combats, décédés des suites de blessure ou de maladie sont inhumés dans le cimetière communale. Le 4 avril 1873 une loi est votée obligeant les communes à regrouper les tombes. Un modèle type d’entourage modulable en fonction du nombres de dépouilles a ré-inhumer est alors défini portant en médaillon le rappel de la loi. Lors de la création du nouveau cimetière en 1895 les tombes sont regroupées sous ces nouvelles tombes. Une pour les allemands et une pour les français.

5 soldats français et 5 allemands y reposent.

Nous avons retrouvé la trace de nos 5 compatriotes dans l’état civil.

  • 9 décembre 1870, Eugène de l’ISLE 29 ans. Militaire chargé d’une mission sur Paris par le gouvernement de Tours. Décédé à l’hôpital.
  • 14 janvier 1871, Emmanuel BOURREAU 25 ans. Garde Mobile des Deux Sèvres. Entré à l’hôpital le 9 janvier. Mort des suites de ses blessures.
  • 18 janvier 1871, Jean POIRIER, garde mobile d’ Ille et Vilaine. Déposé par l’ennemi qui l’avait fait prisonnier le 17 janvier. Mort des suites de maladie.
  • 21 janvier 1871, Nestor DAUZEVILLE, 25 ans. Garde Mobile de l’Orne. Entré à l’hôpital le 18 janvier. Mort des suites de maladie.
  • 24 janvier 1871, Joseph MAHIEUX. Soldat au 3e Régiment de Ligne, originaire de l’Aisne. Entré à l’hôpital le 23 janvier. Mort des suites d’un coup de feu tiré accidentellement par un factionnaire allemand gardant les prisonniers dans l’église.

Les soldats allemands n’ont pas laissé de trace. Seul information retrouvée, un uhlan Hanovrien décède le 27 décembre. Il rejoint au cimetière 3 autres compatriotes précédemment inhumés.

Les soldats Courvillois

La garde Nationale

Créée en 1789, héritière de la révolution, elle est constituée de de deux corps.

-La garde mobile, appelé également « la mobile » est constituée d’homme de 21 à 40 ans ayant été exempté du service militaire. 28 Courvillois seront incorporés à la 1ere compagnie du 4eme bataillon de Nogent le Rotrou. L’Un d’entre eux, Léon BONNET n’aura pas la chance de revenir, il décédera des suites de maladie le 8 janvier 1871 à l’ambulance du dépôt au Mans.

-La garde sédentaire comme son nom l’indique est chargée de défendre sa ville. Armée de fusils à percussion se chargeant par la bouche, sa valeur combative est très faible. 304 Courvillois la compose, mais la commune ne dispose que de 140 fusils.

Un autre Courvillois, François Neveu soldat au 8eme régiment de ligne décédera à l’hôpital militaire du génie de Metz des suites de dysenterie le 27 novembre 1870.